Belle réflexion que Mgr Claude Schockert,Évêque de Belfort-Montbéliard,nous livre :
« Une seule famille humaine ». C’est le thème que le Pape Benoit XVI propose à notre réflexion pour la 97ème journée mondiale des migrants et des réfugiés. Nous sommes donc appelés à vivre l’Église comme un peuple de toutes les nations. C’est une situation qui nous concerne tous, nous qui, dans l’histoire de nos régions de France, avons depuis de nombreuses décennies accueilli des Espagnols, des Polonais, des Portugais et depuis plusieurs années des Africains, des gens du monde arabe, musulmans ou chrétiens. Nous recevons dans nos écoles des enfants et des jeunes d’origines culturelles ou religieuses très différentes, nous voyons dans nos villages de nouveaux arrivants tandis que nos jeunes font leur vie familiale ou professionnelle sur toute la planète.
C’est un monde nouveau, avec ses joies et ses tristesses, ses angoisses et ses moments de fraternité qui est maintenant devant nous comme un appel de plus en plus urgent à nous rencontrer et à faire ensemble le salut de ce monde qui nous est confié.
S’adressant aux pèlerins français à l’issue de l’Angélus du dimanche 15 août 2010, le Pape a par ailleurs rappelé que « tous les hommes sont appelés au salut ».
« C’est aussi une invitation à savoir accueillir les légitimes diversités humaines, à la suite de Jésus venu rassembler les hommes de toute nation et de toute langue », a-t-il ajouté en souhaitant que les parents éduquent leurs enfants « à la fraternité universelle ». Il faut passer peu à peu « de la peur de l’autre à la peur pour l’autre », a affirmé le cardinal Jean-Louis Tauran.
Ce qui se produit le jour de la Pentecôte, ce n’est pas un miracle transformant les Apôtres et tous les disciples présents, en autant de polyglottes parlant toutes les langues. Le miracle se produit plutôt chez les auditeurs.
Chacun entend le message dans sa propre langue.
Et Luc prend plaisir à établir une longue liste des peuples d’où proviennent tous ceux qui reçoivent le message : ce sont des Parthes, des Mèdes, des Élamites, etc. etc.
A l’heure où est paru sur nos écrans le film « des hommes et des dieux », film du cinéaste français Xavier Beauvois qui est d’abord un film sur une communauté humaine, la communauté des moines de Thibirine, mise au défi de son idéal par la réalité, je ne puis m’empêcher ici de penser à cet admirable passage du « Testament » de Christian de Chergé, écrit peu avant d’être assassiné
en Algérie, il y a 14 ans.
Il parle de sa « lancinante curiosité » de voir ses frères de l’Islam à travers les yeux de Dieu, tout illuminés de la gloire du Christ, [et] ... investis par le Don de l’Esprit dont la joie secrète sera toujours d’établir la communion et de rétablir la ressemblance, en jouant avec les différences.
Dieu nous a tous faits différents les uns des autres.
Cette différence, qui est l’une des caractéristiques de notre beauté comme créatures, est très importante aux yeux de Dieu, qui la respecte et y prend plaisir.
Si nous nous regardons mutuellement avec les yeux de Dieu, nous admirerons et respecterons cette différence.
Cela vaut des personnes. Cela vaut aussi des peuples et des nations.
Ce message vaut pour tous les temps. Il assume une signification et une importance toute nouvelle en notre temps où la grande famille humaine cherche à trouver son unité.
Le défi – et c’est un défi évangélique avant d’en être un politique – est de faire naître une humanité où chaque nation se sente non seulement respectée mais affirmée dans sa différence, que celle-ci soit d’ordre linguistique, culturelle ou religieuse. L’Église d’aujourd’hui est confrontée au même défi.
Le concile Vatican II a réaffirmé l’importance d’annoncer le message de telle sorte que chaque peuple et chaque culture le reçoive dans sa langue, c’est-à-dire dans le respect de tout ce qui fait sa différence culturelle.
Après Vatican II, on a beaucoup parlé de l’option préférentielle pour les pauvres ; de nos jours il faut peut-être se soucier également de l’option préférentielle pour la différence.
Dans l’aventure ou la tragédie vécue par beaucoup d’émigrés, souhaitons qu’ils puissent trouver sur leur chemin douloureux l’Eglise « mère et éducatrice », qui a toujours eu une sollicitude maternelle envers tous ceux et celles qui vivent dans des situations difficiles, en leur offrant une aide de première urgence, en s’engageant dans la défense de leur dignité comme personnes et en prenant la défense de leurs droits humains.
+ Mgr Claude Schockert,
Évêque de Belfort-Montbéliard,
en responsabilité de la Pastorale des Migrants